La répétition provoquée

Article publié dans la revue PLI n° 6 (revue de psychanalyse de l’EPFCL-France du pôle 9 Ouest) à partir d’une conférence prononcée à Rennes le 27 mars 2010 et suivie par des échanges.

 

J’ai intitulé mon propos la « Répétition provoquée », mais je vais commencer par quelques réflexions sur la question de savoir pourquoi, dans le mouvement analytique, depuis Freud, on a confondu la répétition et le transfert, en pensant que le transfert était structuralement répétition. Je crois que cela tient au fait que la répétition se manifeste électivement au niveau des ratages de l’amour, pas seulement, mais pour l’essentiel. Et il se trouve que le transfert génère de l’amour. En tout cas le transfert crée un attachement, on ne peut en douter. Celui qui parle à un analyste s’attache à lui. Un attachement qui est fort, qui même est contraignant, et dont certains craignent qu’il ne le soit trop. De ce fait, dès le début, Freud a homologué la névrose de transfert, et  la névrose infantile.

La névrose de transfert n’est pas un doublet de la névrose infantile

Dans le texte de 1920, pour introduire la répétition, Freud s’appuie sur l’amour de transfert, en disant que le transfert répète les malheurs de l’amour infantile. Vous pouvez vous rapporter à un passage que j’ai souvent cité de l’Au delà du Principe de Plaisir où, vraiment, pour la première fois Freud produit le vrai concept freudien de la répétition. Il y a une page qui m’a toujours impressionnée, qui vibre d’une façon inhabituelle chez Freud. Il y explique comment, finalement, le transfert répète « la perte d’amour et l’échec qui portent au sentiment d’estime de soi un préjudice durable qui reste comme une cicatrice narcissique1 ». Et il décline tous les malheurs de l’enfance, ces malheurs que nul ne peut éviter.

Premièrement, la recherche sexuelle de l’enfant est vouée à l’échec car selon Freud elle est due à ses limites corporelles. En tout cas, quelle qu’en soit la cause, la recherche sexuelle « n’aboutit pas à une conclusion satisfaisante ». Et c’est de là, selon Freud, que viennent les plaintes inextinguibles des sujets, du genre « Je ne puis rien mener à bien, rien ne me réussit ». Le sentiment d’échec relayerait donc le premier échec de la recherche sexuelle.

Deuxièmement « le lien de tendresse qui attachait l’enfant à ses parents est voué à succomber à la déception, à l’attente vaine de la satisfaction et à la jalousie quand il y a un autre enfant qui vient à naître ».

Troisièmement enfin, chose qu’on a complètement oubliée aujourd’hui, Freud insistait sur la « propre tentative de l’enfant menée avec un sérieux vraiment tragique, de créer lui-même un enfant et qui échoue de façon humiliante». Il ajoute que les efforts de l’éducation ne font ensuite que redoubler « l’ampleur du dédain, qui est devenu le lot de l’enfant », pour conclure finalement qu’« il y a un petit nombre de modalités typiques de fin de l’amour de cette période ». Là, Freud affirme donc très fort que les espoirs de la première enfance se terminent toujours mal, ce qui le conduit à supposer que la névrose de transfert au travers de toutes ces demandes et leur échec — recherche sexuelle, attente de l’amour, attente d’enfantement — n’est rien d’autre que le doublet de la névrose infantile.

J’ai repris les termes de Freud, mais, à vrai dire, cette période de l’enfance n’est pas à proprement parler une névrose, mais plutôt une période où tout enfant (psychotique mis à part peut-être) est confronté au destin de l’être parlant, donc confronté à une première mise en œuvre de la structure. En tout cas ce sont les exigences de l’amour qui ont fait confondre transfert et répétition. Lacan s’est opposé à la thèse de Freud, il a réussi à la débouter, mais après l’avoir relayée, et prise en compte. Le transfert-répétition de la névrose infantile, il appelle ça joliment « l’erreur sur la personne2 ». Cela désigne une chose très simple : l’analysant s’adresse à l’analyste comme il s’est adressé à ses autres primitifs, ses parents, quels qu’ils soient. Sauf que déjà Lacan a introduit une distinction sur ce que sont les parents : pour l’enfant, ce ne sont pas seulement des autres imaginaires, des semblables, avec leurs caractéristiques, leurs particularités, ce sont aussi, en tant qu’ils parlent, des grands Autres à qui les demandes sont adressées, et qui, quoi qu’ils répondent, vont être barrés ou non, selon qu’on a névrose ou psychose. Barré cela veut dire très simplement qu’on ne sait pas ce qu’ils veulent, ni au niveau de leur désir ni au niveau de leur jouissance, et que l’enfant en est réduit à l’interpréter.

Alors l’analysant va certes interpeller l’analyste comme Autre barré dans le transfert, mais toute la question est de savoir comment l’analyste va répondre. Ce qui est déterminant, ce n’est pas la demande analysante mais la réponse spécifique de l’analyste.

Je peux déjà rappeler comment Freud a répondu et comment ont répondu les post-freudiens, je veux dire ceux qui ont suivi immédiatement Freud, pas ceux qui se disent freudiens aujourd’hui.

Freud a donné l’exemple, il a pensé qu’il fallait interpréter cette erreur sur la personne. Il est parti avec l’idée que le seul instrument de l’analyse est l’interprétation et donc, se trouvant face à des analysants qui l’interpellent comme ils interpellaient les parents, il a immédiatement pris la voie d’interpréter cette interpellation comme une répétition. Et dans sa suite on s’est mis à parler de transfert paternel, ou de transfert maternel.  Ça revient à dire « vous me prenez pour votre père », « vous me prenez pour votre mère ». Mais cette voie qui interprète le transfert s’est avérée une impasse, elle ne change rien. Lacan en a donné une raison très convaincante. Si on est interpellé comme Autre barré parental, ce qui arrive bien sûr, et si on répond, la réponse va évidemment être prise comme venant de l’Autre du transfert. Par exemple si on a affaire à un transfert négatif sur la mère, l’interprétation fût-elle par la répétition transférentielle, sera prise dans ce transfert négatif et donc rejetée. La solution est alors repoussée à l’infini. Freud a buté sur ce point et c’est sans doute ce qui l’a mené à ce qu’il appelle la « butée de fin d’analyse », autrement dit la réitération, à la fin même de l’analyse, d’une revendication infantile primaire, issue des déceptions de l’enfance. Ce schéma est absolument clair dans l’histoire de l’analyse.

Un mot sur Ferenczi qui fut l’un des premiers à s’être aperçu, en pratique, de l’impasse en question et à avoir mesuré que l’interprétation du transfert comme répétition, bien loin de réduire la névrose infantile, faisait flamber ses exigences. Et il a cherché une autre voie, dans laquelle il s’est épuisé en vain, essayant plutôt, je dirais, de réparer l’Autre. C’est à dire que là où l’Autre parental n’avait pas répondu, n’avait pu satisfaire les trois demandes de l’enfant énumérées par Freud — recherche sexuelle, demande d’amour et de création d’enfant — il a tenté, disons de faire mieux en essayant de colmater cette inextinguible frustration de la demande, de la « gratifier ». Cela n’a pas moins échoué que le reste.

La réponse de Lacan s’est faite en plusieurs étapes, toutes allant dans le même sens. Il a commencé par souligner qu’interpellé comme Autre barré, l’analyste ne répond pas comme Autre. Mis à la place de l’Autre, il fait le mort, ça veut dire simplement qu’il ne répond pas comme Autre. Il faut une troisième ou plutôt une quatrième place, comme dans le bridge : les deux places imaginaires et les deux places symboliques. C’est à partir du quatrième qu’on peut obtenir la différence. Faire le mort quand on est à la place de l’Autre, ça veut dire très concrètement qu’on n’interprète pas la répétition transférentielle. C’est une indication pratique.

Je vous renvoie à La Direction de la cure où se trouvent beaucoup d’indications à cet égard. Première indication, l’analyste a en effet affaire à la répétition de la demande car le sujet, lui, «n’a jamais fait que demander» depuis le début3. Il entérine donc la demande analysante comme demande de toujours. Deuxième indication, l’analyste ne répond pas à la demande, ni dans un sens ni dans l’autre, ni pour la frustrer, ni pour la gratifier. Voilà la polémique, commencée avec Ferenczi, le premier à avoir donné l’exemple de gratification de la demande, et qui se poursuit en 1958 avec tout un courant de ses contemporains qui, confrontés aux frustrations analysantes, sommés d’y répondre, sont tentés de « panser » la plaie. Lacan dit ni gratifier ni frustrer ! Qui donc disait qu’il fallait frustrer la demande ? C’est quand même un peu Freud qui, en réponse à la «méthode active» de Ferenczi, soulignait la nécessité d’un degré de frustration pour que l’analyse continue. Freud avait l’idée que la frustration analysante était un des moteurs de l’analyse.

Mais que l’analyste tente soit de frustrer soit de gratifier, selon Lacan, c’est tout un : il fait l’Autre et ramène le transfert à la suggestion, car dans les deux cas, il signifie à l’analysant que « ce qu’il veut, c’est ce qu’il demande ». Or non seulement sa demande est intransitive, demande d’aucun objet, mais ce qu’il veut comme désir inconscient ou comme jouissance, ne peut pas être ce qu’il articule comme demande.

Je cite cette phrase capitale de La direction de la cure, « pour ce que le sujet, à l’analyste, impute d’être (d’être qui soit ailleurs), [sous entendu, ailleurs que de la place de l’Autre de suggestion] il est possible qu’une interprétation4 » fonctionne. Dit autrement, et c’est une idée très juste, si le transfert n’était rien d’autre que répétition, l’analyse serait impossible. Loin d’y porter quelque solution, elle ne ferait que redoubler, proroger, voire aggraver la névrose infantile. Corrélativement, il n’y a d’analyste qu’à ce qu’il se refuse à faire l’Autre. Comment est-il possible de manier le transfert sans redoubler la névrose infantile ? C’est une question technique, mais Lacan a accentué l’idée que structuralement le transfert n’est pas la répétition, et c’est parce qu’il n’est pas la répétition qu’il peut être mis en jeu contre la répétition5.

L’hystorisation de l’inconscient-langage et l’inconscient réel

Je ne peux pas ici suivre pas à pas des divers remaniements conceptuels de Lacan, mais notez qu’en 1964, dans Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, il commence par dissocier les concepts de l’Inconscient et de la répétition. Il avait posé très tôt que l’inconscient est langage. En effet, dès lors qu’il se déchiffre — et on ne déchiffre qu’un langage — l’inconscient est langage, fait d’éléments que l’on dit signifiants, qui sont là dans la parole du sujet et qui insistent dans une analyse. Ces éléments de l’inconscient président à différents phénomènes cliniques : d’abord aux symptômes que l’on déchiffre, mais aussi aux formations de l’inconscient : rêves, lapsus, mots d’esprit. On les retrouve aussi dans l’association libre analysante, qui est à mettre en série avec les symptômes et les formations de l’inconscient. C’est de la parole analysante que l’on essaie d’extraire des signifiants cruciaux. C’est la grande thèse de Lacan, indiscutable, jamais remise en question, mais qui reformule les implications de la technique freudienne.

Quand il dit l’inconscient « structuré comme un langage6 », cela signifie que l’inconscient est une chaîne signifiante, homologue à la chaîne de la parole. Dans la grammaire de la parole les signifiants font chaîne, le modèle le plus simple étant la phrase, et Lacan a pensé l’inconscient refoulé comme une chaîne signifiante liée aux représentants du sujet. C’est ce qu’inscrit son graphe du désir où se nouent la structure rétroactive de la parole et la structure substitutive du langage. Ainsi l’analysant construit son histoire, autrement dit, il s’hystorise  [avec un i grec] lui-même, dans son analyse7. Ici j’ouvre une parenthèse : à notre époque, il y a une aspiration frénétique à s’hystoriser. Celle-ci ne se réalise pas seulement dans l’analyse mais aussi dans des ateliers qui élaborent des récits de vie. Aujourd’hui il y a des spécialistes qui se proposent pour écrire la biographie des anonymes. Les sujets actuels sont tellement perdus dans leur solitude qu’ils éprouvent le besoin de laisser une trace, et qu’ils souhaitent que leur vie s’ordonne en s’hystorisant.

Dans l’analyse aussi on s’hystorise : on reconstruit les malheurs d’origine, le rapport qu’on a eu aux autres, ce qu’on leur a demandé, ce qu’on n’a pas obtenu…Ce faisant, on donne sens à ses symptômes !

La chose est lisible dans deux exemples freudiens. D’abord Dora, puisque c’est l’hystérique qui a fabriqué ce modèle et l’a soufflé à Freud. Quand ce dernier pose le deuxième type d’identification dans la topique de 1920, l’identification hystérique, dont l’exemple est la toux, un symptôme corporel, il ne s’agit pas d’une imitation de son père (qui existe aussi dans l’hystérie). Dora reprend un trait, mais un trait seulement, un trait corporel de son père dans son propre symptôme. On parle là d’identification par le symptôme. C’est donc bien un symptôme qui est lié à la dialectique intersubjective, à l’hystoire du rapport à l’Autre. Ici le symptôme, transitoire, disparaît avec l’analyse et laisse à penser qu’avec le sens historique on peut soigner les symptômes de corps. Deuxième exemple, parfaitement convaincant, L’homme aux rats. Son obsession est, à coup sûr, un scénario de jouissance : le supplice des rats prélevé sur le récit du capitaine cruel. Il l’applique dans sa fantaisie à sa dame et à son père. Là encore, on a un symptôme de jouissance directement noué à l’histoire du sujet, qui donc prend sens à partir de l’hystorisation. Comme la toux de Dora ce symptôme disparaît sous l’effet de l’analyse.

Ce sont donc des symptômes qui laissent supposer que l’anomalie de la jouissance symptomatique est liée à la vérité du sujet, la vérité de son hystoire, et que donc cette anomalie de jouissance est réductible par l’élaboration de vérité. C’est ce qui a fondé l’optimisme thérapeutique de Freud et de Lacan. Mais cette grande période d’optimisme n’a duré qu’un temps, on s’est vite aperçu que ce type de symptôme et ce type de construction n’épuisaient absolument pas le statut de la jouissance des sujets parlants.

Je ne vais pas reprendre ici en détail ce qui a conduit Lacan à poser «l’inconscient réel», hors sens, qui fait la coalescence des éléments de l’inconscient et de la jouissance, que j’ai mis en valeur. Ces éléments sont des traits unaires, si on veut, mais en un sens différent, non pas des traits unaires prélevés sur  l’Autre, mais des traits unaires qui sont disjoints de la problématique subjective et qui règlent directement la jouissance ou ses conditions quand il s’agit de traits dits de perversion.

Là encore nous avons un exemple freudien. C’est le cas de l’homme qui n’était attiré que par les femmes présentant un « brillant sur le nez8 ». Un trait de perversion innocent qui ne fait de mal à personne et qui en outre a l’intérêt de monter la fonction constituante de lalangue. Le « regard sur le nez » « Glance on the nose », dans son bilinguisme, s’est traduit en « brillant sur le nez » [Glanz auf der nase], mais n’est pas lié à l’Autre barré. De ce Glance on the nose on peut dire ce que Lacan dit du réel de l’inconscient, que c’est un réel « antinomique à toute vraisemblance9 », qui n’a en effet rien à voir avec la vérité du sujet, si la vérité est bien faite de ses débats avec le discours de l’Autre. Cependant, cet inconscient réel n’est pas sans être la trace des contingences de l’histoire, ici celle du bilinguisme du petit curieux et le passage du Glance au Glanz témoigne d’un « savoir sans sujet10 » opérant à partir de lalangue, et en prise avec le corps. Ces traits unaires de l’inconscient qui président aux rapports de corps à corps, divisent le sujet mais ne le représentent pas, et ne font pas chaîne avec les représentants du sujet. Heureusement Lacan l’a explicité dans Les Noms du Père : « contrairement à ce que j’ai dit — c’est très rare que Lacan objecte à ses propres thèses — les signifiants dans l’inconscient ne font pas chaîne11 ».

Cependant, avant de franchir ce dernier pas, Lacan en avait fait un autre qui, je crois, le conditionne, celui de disjoindre les concept de l’inconscient et de la répétition. Et il lui a fallu du temps pour ce faire, puisque ce n’est qu’en 64 qu’il l’introduit .

La répétition, effet de l’inconscient

Je reviens donc à la répétition. L’inconscient n’est pas la répétition, l’inconscient c’est l’efficace de ses S1. Là-dessus, on n’a pas tout à fait assimilé Lacan, souvent on continue étourdiment, dans tout ce qu’on expose, à les confondre, alors qu’il il faut les distinguer. Même si entre eux il y a un lien : c’est l’inconscient qui cause la répétition. Qu’on les conçoive comme représentants du sujet, ou plus tard comme traits de jouissance, ces S1 déterminent la « rencontre manquée ». L’inconscient n’est pas la répétition, il en est la condition nécessaire. Lacan ne reprend pas telle quelle la conceptualisation de Freud, il la repense en fonction de sa conception des effets du  langage, spécifiquement de ses S1. Le premier effet est un effet de perte. Dès qu’il y a un trait il y a de la perte. J’ai expliqué cela à Avignon récemment12. Dans le séminaire D’un Autre à l’autre13, il insiste sur l’entropie, c’est la même chose, il y a de la perte. Il y a un deuxième effet avec la perte de ce que serait la jouissance non marquée, que ce soit le trauma ou le plaisir exquis des premières expériences de jouissance non marquée14 les traits deviennent eux-mêmes attractifs, sur fond de perte. Effet de perte mais aussi effet de transfert produisant du plus, de récupération de jouir, de plus de jouir. Autrement dit, à partir de ces années, la répétition désigne pour Lacan le statut même de la jouissance du parlêtre. La première formule de 1964, disait : « rencontre manquée15 ». Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de jouissance, mais plutôt qu’il y a de la jouissance qui empêche la rencontre qui ne serait pas manquée.

Dans tous les cas « rencontre manquée » veut dire que le parlant, sujet à la répétition, est un sujet sans partenaire : ni père, ni femme, mais non sans jouissance. On a pu dire en forçant que son vrai partenaire est la jouissance, mais qui a jamais pensé que la jouissance fasse un vrai partenaire ? On ne se plaindrait pas tant si on y croyait. Autrement dit les Uns constitutifs de l’inconscient programment le manque à la rencontre avec le partenaire. Finalement comment trouve-t-on son partenaire, puisqu’on en trouve malgré tout ? Réponse de Lacan : au hasard16! L’inconscient programme la rencontre manquée et du coup le partenaire où chacun investit sa propre jouissance se rencontre au hasard, par contingence, par bon-heur, en deux mots !

La jouissance en question, celle que programme l’inconscient, n’est évidemment pas celle du rapport, comme Lacan le dit ensuite, et du coup il peut reformuler la répétition, rencontre manquée, avec les modalités logiques. La répétition c’est ce qui ne cesse pas de s’écrire de la jouissance, soit la jouissance fantasmatique via l’objet a, soit les traits unaires du symptôme. Elle est corrélative de ce qui ne cesse pas de ne pas s’écrire, le rapport sexuel !

Freud a cru que la répétition relevait du pulsionnel, parce qu’il s’était aperçu que c’était démoniaque, qu’il n’y avait rien à faire pour l’empêcher, autrement dit que le dispositif analytique butait dessus. La trouvant  incoercible, il a pensé qu’il y avait une pulsion de répétition, ce qu’il a appelé au fond pulsion de mort ! Il n’y a pas de pulsion de répétition, mais une structure qui exclut la rencontre ! Il faut dire clairement que Lacan a remplacé l’idée de pulsion de mort, l’idée du pulsionnel de la répétition, par le structural de la répétition. Dès lors, qu’est-ce que le transfert va pouvoir faire sur une répétition qui ne peut pas cesser, non pas parce qu’elle est démoniaquement pulsionnelle, mais parce qu’elle est structurale, tenant à la nature du langage ?

Dans Le séminaire XI, il me semble qu’il le formule avec une certaine ambiguïté car il ne fait que commencer à entrer dans ce développement. L’exemple majeur de rencontre manquée qu’il y développe très longuement, c’est « Père ne vois-tu pas que je brûle », rêve de l’enfant mort qui invoque le père, tout comme on a entendu le « Père, pourquoi m’as-tu abandonné ? » du Christ sur le Golgotha17. On pense donc rencontre manquée avec le père. Mais ce n’est pas si simple ; c’est aussi bien rencontre manquée d’un père, le rêveur, avec le fils. Je ne reprends pas ce point dans le détail.

On sait qu’au fur et à mesure qu’il a avancé, Lacan a aussi accentué la rencontre manquée dans le domaine du rapport entre les sexes. Ce serait plutôt « Femme ne vois-tu pas que je brûle ? » si on pouvait le soutenir. Ça l’a conduit à la formule du « pas de rapport sexuel ». Mais dès Le séminaire XI, dans le chapitre : La répétition, il donne deux exemples de répétition, d’importances disproportionnées. Un seul a été aperçu et commenté, c’est le “gros” exemple : « Père ne vois-tu pas que je brûle » et puis il y a un petit paragraphe sur Kierkegaard dont Lacan a dit, au moins quatre ou cinq fois dans son oeuvre, qu’il avait aperçu la répétition avant Freud. Kierkegaard a écrit un ouvrage La répétition, traduit aussi par La reprise, à propos du rapport à une femme. C’est la rencontre manquée de Kierkegaard avec Régine, son premier amour, rencontre manquée qu’il a d’ailleurs largement provoquée. J’ai commenté cela cette année. C’est impressionnant, dans ce texte, Kierkegaard ne cherche pas à fuir la répétition, il cherche ce qu’il nomme une vraie répétition. Il raconte toutes sortes de péripéties où tout était pareil, mais là, selon lui, pas de répétition. Parce que la répétition est toujours neuve. A la fin du livre, dans le chapitre appelé lui-même La répétition, le jeune homme apprend que la jeune fille qu’il a déjà perdue, puisqu’il a rompu, vient de se marier. Alors, loin d’être abattu,  il exulte, il sait qu’elle est vraiment définitivement perdue et s’écrie « enfin je tiens une vraie répétition », il tient en effet une vraie rencontre manquée, où le sujet approche le plus de son être.

Par parenthèse, rappelons que Lacan a donné le nom de Dieu à ces deux partenaires que sont le père et La femme, autre face de dieu selon Encore. Cela éclaire le fait que dans Le séminaire XI, après avoir commenté longuement « Père ne vois-tu pas que je brûle», comme rencontre manquée, il en vient à faire des remarques sur la perspective athée de la psychanalyse. Dans une analyse on part avec l’espoir de corriger ce que l’on croit contingent. On s’imagine nécessairement qu’une partie de ses souffrances symptomatiques, les répétitions, les ratages de la rencontre, sont des accidents, on croit qu’on va arriver à les corriger. En fait ce qui est contingent ce sont les rencontres de l’amour, ce qui n’est pas contingent mais structural c’est le manque à la rencontre dans l’amour même — ce qui est une autre façon de dire le « non rapport sexuel » !

Dans l’analyse le patient décline sa plainte, les figures de ses répétitions propres, une par une, qui s’avancent sous des formes diverses pour chaque sujet ; mais tout le monde, analyste comme analysant, constate que décliner les formes de la répétition dans sa parole ne les arrête pas, si ce n’est peut-être que le sujet est plus averti après qu’avant. C’est un faible changement, il faut bien le dire, qui ne modifie rien à la forme sous laquelle la répétition grimace pour chacun. Donc dans l’analyse elle apparaît plus inexorable que jamais. Quel est donc l’effet du transfert sur la répétition ?

La répétition sous transfert

Tout d’abord, notre pratique conditionne la répétition. Le transfert, qui n’est pas la répétition, la produit, au sens fort du terme, il la provoque dans les deux sens de ce dernier terme : chercher et produire. Autrement dit sous transfert, on soustrait la répétition au hasard. Dans la vie, la répétition n’est pas ce qu’elle est sous transfert, ce n’est pas la même, elle se produit au hasard des épisodes avec les partenaires. Sous transfert, la rencontre manquée est soustraite au hasard, dit Lacan, on ne la laisse pas à elle-même comme c’est le cas dans la vie. Le dispositif analytique provoque la répétition.

Il est évident pour tous les analystes que dans l’analyse on parle de la répétition, on ne parle que de ça ! On la déplie, on l’explore, on la déplore, mais ce qu’il faut saisir plus essentiellement, c’est que, bien loin seulement d’en parler, on la met en œuvre dans la relation de l’analysant avec l’analyste. Il y a une sorte d’ironie implicite du dispositif freudien. Comme dans l’amour, la demande de transfert attend la rencontre non manquée, c’est le propre de tout amour, à chaque fois on y croit, on l’espère. Et de fait, sur fond de rencontre manquée, il y a des rencontres meilleures que d’autres.

Sous transfert, on attend la rencontre pas manquée, mais le dispositif analytique programme la rencontre manquée. Pourquoi ? J’ai d’abord dit parce qu’il y a de l’amour, mais il faut dire un peu plus. C’est parce que le transfert est une demande qui s’adresse à un partenaire qui n’est pas n’importe lequel, que Lacan a nommé  sujet supposé savoir. Ce n’est pas n’importe quel objet, ni père, ni femme, mais un objet spécial dont on attend des interprétations et pas seulement de l’amour. L’amour ne s’éprouve pas toujours vivement dans l’analyse. Le sujet supposé savoir c’est quand même un troisième nom de Dieu, un partenaire dont on attend qu’il réponde : père, femme et sujet supposé savoir. Très logiquement, Lacan est amené à formuler que le transfert n’est pas n’importe quel amour, c’est « de l’amour, dit-il, qui s’adresse au savoir18 », ce qui le distingue des autres amours. Plus précisément c’est une demande qui s’adresse au savoir.

Dans l’analyse, l’analyste consent à cette demande, tout en sachant où elle va mener, et même il fait plus que consentir, il essaye de provoquer cette demande, dans sa différence avec la simple demande de guérir ! On  provoque cette adresse au savoir avec pour résultat de mettre I’inconscient en exercice ! Via l’association libre dans la parole analysante, on arrive à isoler des S1 de l’inconscient, on produit les traits unaires qui sont connectés, du point de vue satisfaction, à la jouissance du fantasme et à la jouissance du symptôme. Mais les traits unaires de l’inconscient n’ont pas de partenaire, et à faire insister les Uns de l’inconscient19, on révèle au mieux la perversion de la jouissance, on ne jouit pas du rapport mais on jouit des traits de l’inconscient dans le fantasme et dans le symptôme.

Décliner les Uns de l’inconscient dans une analyse, mettre en évidence fantasme et symptôme, c’est une opération solidaire de la solitude de ce que Lacan a appelé le « Un qui se sait tout seul20 », là où se dirait le rapport.  En paraphrasant le « Un qui se sait tout seul », là où on décline les Uns du fantasme et du symptôme. Finalement l’analyse n’écrit que du Un. Le Un n’est pas simple, il y a des Uns différents, j’y ai beaucoup insisté cette année, mais dans tous les cas, l’inconscient n’écrit jamais le deux qui ferait rapport ! Décliner l’inconscient est donc la plus sûre façon d’affirmer la nécessité de la répétition. Bien sûr, il y faut le transfert qui reproduit la rencontre manquée, à la mesure même de l’analyse de l’inconscient.

L’analyste médiateur

L’analyste, ai-je dit, n’est pas n’importe quel partenaire. Lacan l’a qualifié d’une jolie façon, c’est, dit-il, le partenaire « qui a chance de répondre21 ». J’ai dit que dans l’analyse on soustrayait la répétition au hasard, à la chance. Lacan indique là que la chance, est passée du côté de l’analyste. Le hasard est de son côté. Mais celui qui a chance de répondre c’est celui qui manie l’interprétation de façon à faire décliner le Un lié à l’inconscient, fauteur, si je puis dire, de la rencontre manquée. Pour Lacan l’interprétation ajustée au « Y a d’ l’Un » de l’inconscient, n’a pas d’autre visée que la mise en évidence du Un, quel qu’il soit. Cependant l’analyste ne répond pas comme sachant. L’interprétation ne se fait pas au nom du savoir, l’analyste est interpellé seulement comme sujet supposé savoir, il ne répond pas au nom du savoir.

À l’exception de Freud, qui, se laissant susciter par l’hystérie, a produit tous les signifiants qui constituent le corpus de la psychanalyse, toutes les significations et signifiants de l’Oedipe et de la pulsion avec lesquels il a interprété ! Cela a très bien fonctionné pendant un petit temps. Mais très vite, une fois divulgué, ce savoir tout-venant, qui court les rues, a perdu ses effets de vérité, c’est connu. Essayez aujourd’hui les interprétations œdipiennes classiques, au mieux elles ne font aucun effet, au pire elles vous rendent un peu ridicule, parce que l’analysant n’a pas besoin de vous pour se les faire, elles sont partout, on les connaît toutes, et elles sont sans plus d’effet ! Freud, et le mouvement analytique, ont entériné cet amortissement des effets des interprétations de savoir.

Lacan a fait beaucoup pour corriger cela et pour indiquer toutes les étapes de ses définitions de l’interprétation, il y en a plusieurs. C’est que l’analyste n’interprète pas avec le savoir, il est médiateur du savoir inconscient du patient. De plus, il est médiateur d’un savoir qu’il ne sait pas, qui n’est pas le savoir généralisable de l’Oedipe mais un savoir qui est propre au patient. C’est seulement à  la fin d’une analyse qu’il peut en avoir une petite idée. C’est étonnant, on lui dé-suppose le savoir juste quand il commence à en savoir un bout, Lacan l’a noté. Il doit y avoir un malentendu dans cette affaire. Médiateur d’un savoir fait de Uns, cela va vers la répétition de la rencontre manquée. Autrement dit en termes plus mathématiques, on fait apparaître comme inaccessible le deux, qui serait celui du couple. Il y a une définition mathématique de l’inaccessible que Lacan a développée, mais c’est aussi un terme qui a un sens commun, portant une note de pathos. L’inconscient ne produit pas le deux qui ferait chaîne avec le Un du sujet.

Les eurêka de la répétition manquée

Tentons de dire les choses autrement, un peu mieux. Peut-on satisfaire la demande adressée au savoir ? Dans La Direction de la cure, Lacan a beaucoup insisté sur la non réponse à la demande, car y répondre c’était la décevoir dans tous les cas, parce qu’elle est demande intransitive adressée à l’Autre, parce qu’elle ne demande rien de spécial, sauf l’Autre. Par contre la demande que l’on adresse au savoir peut être satisfaite en partie, c’est ce que fait l’analyste. Le dire comme cela peut surprendre, mais la demande de savoir est satisfaite chaque fois qu’un élément du savoir inconscient est produit, mis en évidence, même si ce savoir est hypothétique, comme Lacan le souligne dans Encore. Chez les psychanalystes, il faut dire la vérité, on a des pudeurs avec le savoir, on n’aime pas le savoir, on aime mieux le manque, le désir, celui qui ne sait pas, tandis qu’on suspecte le savoir supposé tout. A vrai dire, il faut vraiment n’être jamais entré dans le champ de la quête d’un savoir pour craindre le tout savoir.

Bref, cette réponse a deux effets. Premier effet elle satisfait le sujet, ce sont les eurêka de l’analyse ! « Ah ! j’ai trouvé, j’ai saisi quelque chose, j’ai enfin réalisé…». Sans cela il n’y aurait pas d’analyse. En fait, il y a deux types d’eurêka : les eurêka du sujet qui aperçoit quelque chose de sa position, « je réalise ce que j’ai fait avec ma mère, avec ma sœur, avec mon père, avec tel autre », et un autre type d’eurêka, qui consiste à extraire un signifiant, un trait unaire de l’inconscient dont on se demande d’où il sort tant il paraît hors sens, mais c’est une satisfaction de l’avoir attrapé. C’est bien pourquoi Lacan a parlé à juste titre du gay savoir22 comme satisfaction du déchiffrage. Donc la demande de savoir reçoit des satisfactions, même si elles ne sont pas totales.

Mais, deuxième effet corrélatif, inévitable, chaque eurêka réactualise la rencontre manquée. Dans chaque eurêka ce que le sujet aperçoit c’est soit le Un de sa position propre, solitude, soit les Uns de l’Inconscient que j’ai longuement évoqués et dont on peut tirer une certaine jouissance. Les sujets y tiennent, et quand ils en ont attrapé quelques Uns, ils ne sont pas prêts à les lâcher. Sans doute parce que ça satisfait quelque chose, mais cela satisfait à la jouissance qu’il ne faudrait pas, pour qu’il y ait un rapport sexuel ! C’est pourquoi, je crois, si le transfert est bien demande adressée au savoir, Lacan peut réécrire la répétition, comme il le fait dans L’étourdit23, en deux mots : ré-pétition. De cette petitio on retrouve en français la racine latine dans pétition, demande collective, et dans appétit, qui connote davantage le registre de la jouissance. Donc, satisfaire l’amour du savoir par l’interprétation, en faisant décliner la série des Uns de l’inconscient, c’est mettre en fonction et en évidence l’inaccessibilité du deux. C’est cela que fait le partenaire qui a chance de répondre. Évidemment c’est une autre gratification que celle de l’amour, plutôt une gratification du désir de savoir, s’il y en a.

Je vais conclure

En révélant la structure du ne cesse pas c’est à dire du nécessaire et de l’impossible aussi bien, on ne change pas la répétition qui est irrémédiable non pas pulsionnellement diabolique, démoniaque, comme le croyait Freud, mais pour cause, de la structure de langage ! On ne change pas la répétition irrémédiable, mais on change le sujet dans sa position par rapport à la répétition, lui permettant de la repenser.

Remarquons que c’est une idée d’un changement qui n’est ni celui de l’inconscient ni celui de la répétition dont on trouve déjà une trace, même très accentuée, chez Freud, dans le dernier paragraphe d’Analyse finie-infinie24. Après avoir évoqué la butée sur le complexe de castration, qui est en fait la butée sur la revendication infantile, pas sur la castration elle-même, il ajoute très placidement en substance, ne nous frappons pas, si nous avons fait tout ce que nous pouvons pour éclairer l’analysant (le patient dit Freud), eh bien en quelque sorte les cartes sont dans son camp pour modifier sa position  Il est donc en train de dire, non qu’on va supprimer la castration mais qu’on peut modifier quelque chose du côté du sujet, de sa position.

Lacan a toujours insisté sur le fait que la transformation de fin d’analyse est transformation du sujet, du sujet qui n’est pas son inconscient, mais qui a un inconscient, comme un corps parasite. On pourrait recenser toutes les citations de Lacan où il indique une fin par modification du sujet. Par exemple quand il évoque la fin par « position dépressive » dans La proposition sur le psychanalyste de l’école [AE]25 et le deuil de fin ! Ce n’est pas l’inconscient qui fait le deuil, c’est le sujet. Puis, en 1976, dans sa Préface à l’édition anglaise du séminaire XI, où il s’agit de lâcher le « mirage de la vérité26 », de lâcher le mirage de l’hystorisation, c’est encore un changement de position du sujet. Enfin plus tard encore quand il note que ce qu’on peut faire de mieux à la fin, c’est de « s’identifier au symptôme27 », de se reconnaître donc dans les fixations réelles, invraisemblables, de jouissance auxquelles préside l’inconscient.

C’est cohérent avec les formules qui mettaient l’accent sur la démonstration de l’impossible, et, j’ajoute, du nécessaire. Quand le sujet a pris la mesure du ne cesse pas du nécessaire et de l’impossible, il cesse de se battre contre les moulins à vent des promesses de la vérité. C’est un progrès. J’insiste parce que certains en doutent et parlent de fin sinistre. Au contraire ce qui est sinistre ce sont les faux espoirs. En effet, démontrer l’impossible c’est mettre fin au sentiment de l’impuissance, je le souligne souvent. Ce passage de l’impuissance à l’impossible est un virage. L’affect d’impuissance est vraiment ravageant car ce qu’on n’arrive pas à faire on le prend sur soi comme une faute. C’est bien parfois de prendre la faute sur soi, c’est mieux que de se croire innocent, mais pas en toute chose ; on ne peut pas prendre sur soi la faute du langage, le fait d’être parlant. Réduire le sentiment de l’impuissance, mettre fin aux faux espoirs, est une fin extrêmement positive. En révélant l’inexorable, on l’allège ! parce que le sujet peut cesser de s’en faire le porteur, le responsable.

Mais que fait-on du réel antinomique à toute vraisemblance28, c’est à dire des modes de jouissance qui sont disjoints de la vérité du sujet, qui sont là, fixés dans les contingences de l’histoire ? On peut réduire une obsession, modifier les symptômes hystériques, mais que fait-on de ce réel antinomique à toute vraisemblance ? La référence de Lacan au nœud borroméen est solidaire du fait qu’il ait aperçu cette schize radicale entre le symbolique et le réel hors symbolique. Le nœud borroméen, par lequel il remplace l’idée de l’inconscient comme chaîne, donne l’idée qu’on peut nouer — nouer ce n’est pas enchaîner, la jouissance invraisemblable, le nouage peut l’enkyster pour ainsi dire dans l’économie subjective qui, elle, relève du symbolique et de l’imaginaire !

Questions

Marie-Noëlle Jacob Duvernet

La fin de votre exposé m’a évoqué immédiatement ce titre magnifique d’une pièce qui se joue actuellement au Théâtre du Soleil Les Naufragés du Fol Espoir. Vous avez dit que la répétition se dirige vers des Uns solidaires de la solitude du sujet et en cela il y aurait un certain progrès. Avec cette élaboration dernière de Lacan de l’inconscient réel et des traits unaires comme traits de jouissance de l’inconscient, a-t-on perdu de vue l’objet a comme cause de jouissance?

Colette Soler

Je précise, la répétition ne se dirige pas vers les uns, elle est produite par les uns. Quant à votre question j’y ai répondu implicitement en prenant soin de parler des traits unaires qui président à la jouissance et du fantasme et du symptôme. On m’a déjà souvent posé cette question. En parlant de l’inconscient réel Lacan annulait-il ce qu’il a développé antérieurement où il situait toute la jouissance du parlêtre à partir de l’objet a, c’est à dire à partir d’un moins de jouir appelant des plus, des bonus. L’inconscient réel ne déboute pas cette analyse, seulement il la supplante, sans l’annuler. De la même façon que la lettre du symptôme, réelle, hors sens, antinomique à toute vraisemblance, ne supprime pas les symptômes liés au sens du fantasme, donc à la problématique subjective, du type de la toux de Dora et de l’obsession de l’homme aux rats. Il ne faut pas s’imaginer qu’à chaque fois que Lacan avance soit il tire un trait sur ce qui précède soit il dit la même chose. En tant que lecteur orienté par son enseignement, nous avons pour tâche de voir à chaque fois ce que cela ajoute, ce que cela complète, infléchit. Cependant pourquoi Lacan ne s’en est-il pas tenu à l’objet a ? J’ai posé la question dans mon livre 29. Après tout il avait fait une élaboration formidable : les Uns de l’inconscient produisent de la perte, chute de l’objet a et retour sous forme de plus-de-jouir. On avait là quelque chose qui pouvait paraître suffisant, pourquoi est-il allé plus loin? Sans doute y a-t-il beaucoup de facteurs, mais on peut faire valoir que la fin de l’analyse, telle qu’elle est formulée dans La proposition, avec l’idée d’un sujet qui aurait aperçu son statut d’objet, est solidaire d’une fin d’analyse sur un non-savoir, puisqu’en effet l’objet a ne se prête pas au savoir lui qui n’a ni image ni signifiant. Se savoir objet c’est savoir qu’on est pas-tout sujet, point final, ce n’est pas savoir quel objet on est. Croire le savoir c’est parler de son fantasme, sans plus ! Cela faisait donc une fin un peu insatisfaisante. D’ailleurs les analystes de l’époque s’en sont emparés, il y a eu toutes sortes de gloses sur la fin d’analyse par non-savoir, au point que Lacan a dû protester dans son texte de 1967, « De la psychanalyse dans ses rapports à la réalité». Il objecte à cette « mystagogie du non-savoir»30. Il y avait déjà ce petit écueil, ce petit inconvénient, mais surtout l’objet a laisse à désirer quant à l’élaboration de l’inconscient. L’objet a est certainement un effet de langage, un effet de chute de l’inconscient-langage, et il est solidaire de toute la théorie du sujet, mais ça ne disait rien sur les événement de corps du symptôme dans leur rapport à lalangue. Avec son inconscient savoir sans sujet et tout ce qui suit, il a quand même avancé, c’est pour cela que dans Encore, Le séminaire XX, il dit finalement que l’objet a n’est pas le réel, il  est ce qu’on ne sait pas de soi, ou ce qu’on imagine de soi.

Éliane Pamart

Comment l’analyste peut-il n’être pas médiateur du savoir ?

Colette Soler

Freud a été plus que médiateur du savoir, il a été producteur de savoir. Du fait qu’il a produit tout ce corpus freudien, il se pose comme sachant, a dit Lacan31. On ne peut pas dire Freud supposé savoir, il était “sachant”, c’est une formule étonnante. Freud est un de ces rares sujets dont on peut être sûr qu’il avait un “désir de savoir”, non parce qu’il l’a déclaré, mais parce qu’il a produit du savoir. A cette production il y a donc bien un désir qui est supposable. Tout analyste n’est peut-être pas médiateur du savoir pour l’analysant. Les analystes qui interprètent avec le savoir freudien, ne sont pas médiateurs, mais plutôt, en quelque sorte, répétiteurs. Je ne dis pas d’ailleurs que dans leurs intervention, les lacaniens ne se permettent jamais d’emprunter au corpus freudien, je parle seulement de la direction générale de l’action analytique. Au fond l’analyste médiateur de savoir correspond à ce que je qualifie : d’interprétations qui ne disent rien. Ce sont des interprétations qui, dans le dire du sujet, ciblent des éléments, mais qui elles-mêmes n’énoncent rien, même quand elles profèrent quelque chose. Lacan a donné trois exemples très instructifs dans l’Etourdit32. Premièrement quand on évoque une homophonie ou qu’on la souligne, on ne dit rien, on fait valoir simplement que dans ce qui est entendu plusieurs choses diverses peuvent être écrites. On ne se sert que du savoir de notre langue, qu’on partage avec l’analysant, à charge pour lui de voir comment il le prend. Il y a beaucoup d’équivoques d’analystes qui se perdent dans les sables, qui ne sont pas relayées par l’analysant, ce qui n’a pas d’inconvénient. Lacan dit même que «tous les coups sont permis» avec l’équivoque : allez-y essayez, à tout hasard, peut-être que vous tomberez sur quelque chose ! Quand il parle du deuxième exemple d’interprétation équivoque, au niveau du sens, c’est l’interprétation qui renvoie à l’analysant un “Tu l’as dit!”. Évidemment l’analysant ne va jamais penser que c’est une interprétation, car l’attente d’interprétation est plus “gourmande” que cela! “Tu l’as dit”33 est une façon de lui renvoyer ses propres propositions, au niveau de leur grammaire, elle concerne l’équivoque de sens. Troisième interprétation au niveau du non rapport sexuel, c’est à dire au niveau de l’ensemble des pulsions qui fonde l’érotisme mais pas le rapport. Ce ne sont pas des interprétations dont on dirait qu’elles disent quelque chose, elles ciblent le Un phallique ou pulsionnel, et c’est pour cela que je dis “médiateur”. L’interprétation ne se fait ni au nom du savoir, ni au nom de la vérité. Lacan dit que ce n’est pas parce qu’une interprétation a des effets qu’on est dans le vrai ! C’est ce qui fait qu’un thème a commencé à courir : que les analystes d’aujourd’hui n’interprètent plus, comme au beau temps de Freud. Il est sûr que l’interprétation s’est transformée, mais dire que l’analyste n’interprète plus est une ânerie. Il n’y a pas d’analyste qui ne soit en position d’interpréter, sinon le dispositif n’est pas en fonction.

Marie-Annick Gobert

A la fin de sa vie, Freud disait qu’il serait bon qu’un analyste refasse une tranche tous les cinq ans. N’avait-il pas déjà l’idée de tout ce que Lacan a ensuite développé à propos de la répétition, à savoir qu’elle est irréductible et que le travail, quel qu’il soit, que fera le transfert dans une cure, n’épuise pas le sujet. Dans cette consigne qu’il donnait n’avait-il pas déjà l’idée que le transfert et la répétition ne sont pas la même chose et que l’un n’épuise pas l’autre?

Colette Soler

Le fait que la répétition soit irréductible suffit-il à programmer ou à rendre pensable les reprises d’analyse? Ce n’est pas l’idée de Lacan. Pour lui une analyse finie est finie. A ma connaissance cependant, il y a chez Lacan une remarque qui va dans le sens d’indiquer qu’on peut sortir de la demande adressée au savoir, grâce au réel, mais qu’on peut y revenir. Cette remarque se trouve dans L’Etourdit34, où ayant parlé de la fin de l’analyse en termes complexes, il parle de la mise en bande de Moebius du sujet et du phallus, et il ajoute: « Le sujet reste à la merci de son dit, s’il se répète ». Ce qui veut dire que si le sujet recommence à entrer dans l’association libre, la boucle recommence. Ce n’est pas un conseil, mais est-ce que cela veut dire qu’on peut recommencer ? Ce n’est pas sûr. Lacan a toujours considéré que l’analyse ne se faisait pas avec une seule boucle mais avec plusieurs. Donc l’interprétation de cette phrase concernant la réitération de l’analyse possible est problématique. Moi j’ai l’idée qu’une analyse finie ne recommence pas, c’est mon expérience profonde. Sinon cela pousserait à dire, ou bien, quand on reprend une analyse, c’est qu’on avait pas fini celle d’avant, cela ferait beaucoup d’analyses pas finies ! Chez nous peut-être pas tellement, mais il y a des pays où on pratique les dites analyses en série. Par exemple en Argentine c’est quasiment une coutume, on fait deux-trois ans d’analyse, on arrête, puis on reprend.… on fait l’analyse par tranches ; ou bien, autre voie, ce serait se demander si  retourner voir un analyste est nécessairement faire une nouvelle analyse. Quand on souffre ne peut-on pas parler à quelqu’un sans qu’il soit dans la position d’un nouveau supposé savoir, dont on attend l’interprétation ? L’exemple du paranoïaque montre que c’est possible. En outre même s’il n’est pas en position de sujet supposé savoir interprétant, l’analyste est peut-être le seul partenaire neutre qui reste dans la civilisation. Autre raison de s’adresser à lui en cas de besoin.

David Bernard

Vous avez parlé à plusieurs reprises de la rencontre manquée avec le père, avec la femme, du coup je me demandais ce que serait la rencontre manquée pour l’enfant — serait-elle la même que pour l’adulte, et les conséquences à en tirer dans la cure?

Colette Soler

Effectivement, dans Le séminaire XI, Lacan illustre la rencontre manquée par le père. Mais est-ce rencontre manquée avec le père, sens manifeste du rêve, ou rencontre manquée par un père qui dans le rêve, contrairement à ce que dit Freud, ne rencontre pas son fils, mais seulement ses objets voix et regard, sens latent du rêve. Alors que dans son enseignement, la vraie rencontre manquée est la femme.  Alors pour les enfants ? Votre question en pose une autre : Quand est-ce que la rencontre manquée avec la femme peut se produire pour un parlêtre ? Se produit-elle dès l’enfance, ou bien, comme certains l’ont dit, en le reprenant de Michel Silvestre, la rencontre du sexe dans l’adolescence serait-elle celle où vraiment c’est l’épreuve de la rencontre manquée qu’il n’y a pas eu dans l’enfance. Je ne suis pas sûre, j’aurais tendance à dire le contraire, que la rencontre manquée est logiquement dès le départ, dès qu’il y a de l’inconscient. C’est tout le problème de l’articulation entre la synchronie de la structure et la diachronie de l’histoire. Peut-être faudrait-il dire plutôt que les conditions de la rencontre manquée sont là dès qu’il y a l’inconscient, et que cette rencontre manquée prend figure au gré de la fortune. Au fond, avec les malheurs de l’enfance que Freud décrit — la perte de l’Autre, quel qu’il soit, on a déjà toutes les pertes à venir. C’est cela la névrose infantile, la perte de l’Autre est déjà consommée au sens d’accomplie, et au fond l’adolescence n’est qu’un revenez-y, disons une nouvelle vérification.

Élisabeth Léturgie

Avec Hans, Freud a été inventeur de savoir: « J’ai toujours su que…»35 Cette différence extraordinairement fine entre impuissance et impossible est tellement importante à la fin de l’analyse. Existe-t-elle aussi dans les fins de cure d’enfant ?

Colette Soler

Aujourd’hui je suis tentée de tout reverser sur les enfants. Cette formule qui passe de l’impuissance à l’impossible est formidable, mais chez Lacan elle ne désigne pas un changement d’opinion, elle ne désigne pas un progrès de la compréhension ! Elle ne désigne pas plus l’idée que le sujet aurait vécu suffisamment longtemps l’impuissance à répétition pour finir par se dire : “pas la peine d’insister, cela va continuer comme ça, je n’y arriverai pas, c’est impossible pour moi, stop !” Ce n’est pas cela du tout. L’impossible est à démontrer ce qui est beaucoup plus qu’un changement de conviction. Or, on peut faire une démonstration mathématique au tableau, mais comment démontrer quelque chose dans une pratique comme l’analyse où on demande à l’analysant de parler sans réfléchir, de dire ce qui lui passe par la tête, de dire toutes les bêtises possibles. Ce terme de démonstration paraît très paradoxal. Lacan a donné des indications : on démontre l’impossible du deux en déclinant les Uns de l’inconscient. C’est parce que l’analyse n’écrit que du Un qu’on peut considérer que cette écriture du Un réitéré — que ce soit les Uns multiples des traits unaires ou l’Un tout seul — démontre indirectement l’impossible. C’est une démonstration faible, il dit lui-même une démonstration « pas mieux fondée36 » L’insistance de la série des Uns, démontre l’inaccessibilité du deux. Un enfant fait-il cela ? S’il y a une part d’analyse chez un enfant, oui ! Évidemment ça ne conduit pas à réfléchir sur le Un, le deux… mais l’effet démonstratif de l’inaccessibilité du deux est liée à la position du Un, donc possible même dans une analyse d’enfant !

Éliane Pamart

J’aimerais que vous reveniez sur « Femme ne vois-tu pas que je brûle ? »

Colette Soler

En fait, je ne sais pas si on peut dire cela, je l’ai dit, mais je ne suis pas sûre de pouvoir le signer ! Il faudrait chercher une autre formule. Dans « Père ne vois-tu pas que je brûle » on fait quand même appel à Un qui mettrait là-dessus une espèce d’apaisement, qui viendrait bénir, sanctifier la jouissance telle qu’elle est. Alors que ce qui est en jeu dans le rapport de l’homme à la femme, c’est finalement bien sûr aussi la limite du désir et de la jouissance masculine qui cherche à rejoindre l’Autre. La formule serait plutôt « femme ne vois-tu pas que je te cherche ? ».

Jean-Michel Arzur

Je souhaiterais que vous reveniez sur le « réel antinomique à toute vraisemblance37 ». Ce réel n’est-il pas là au début et à la fin de la cure ? Ce qui pourrait aussi éclaircir la question des reprises de cure. Par ailleurs dans cette élaboration de deux inconscients, l’un réel et l’autre qui se déchiffrerait, il y a cette question de la visée de l’analyse dans les cas où l’inconscient réel n’est pas noué aux positions du sujet. Le transfert n’est-il pas une proposition de nouage, là où il n’y en a pas, jusqu’à insérer cet impossible là ?

Colette Soler

Bien sûr que le réel invraisemblable est au début. Les dispositions érotiques d’un sujet s’inscrivent dans les toutes premières années. Freud y a beaucoup insisté, et cela se confirme, même si cela se déploie dans le temps de la vie et qu’il peut y avoir des remaniements. Les traits de perversion se fixent dans les premières rencontres de jouissance. C’est ce qu’implique Freud, quand dans l’Addenda d’Inhibition, Symptôme, Angoisse, il dit que toute névrose est traumatique. Il décline en trois éléments les traits traumatiques : choses vues, (plutôt entre les portes), choses entendues et choses perçues sur le corps propre ! Freud parle de traces mnésiques — pas de traits unaires, mais les traces mnésiques impliquent du trait unaire, qui se fixent très tôt dans la vie, de façon contingente, par rencontre, par accident. La contingence, l’accident n’est pas seulement la rencontre du partenaire dans l’amour. Il y a aussi les premières rencontres de jouissance, contingences qui s’inscrivent, dit Lacan, en nécessité, et qui ne cessent plus de s’écrire tout au long de la vie. En effet le réel antinomique à toute vraisemblance est déjà là au début, sauf qu’au début on ne le sait pas et qu’un sujet encombré par ses fixations, a l’espoir que le transfert va les réduire. Au début on les met au registre du possible, de ce qui pourrait cesser de s’écrire et  tomber sous le coup de l’effet thérapeutique. Dans mon livre, j’ai insisté sur le fait qu’il y a des phénomènes qui sont tout dans l’inconscient réel et d’autres qui ne sont pas-tout dans l’inconscient réel38. Par exemple, dans Finnegan’s wake Joyce écrit la jouissance de la manipulation de la lettre complètement déconnectée de ses autres, de ses semblables, jouissance solitaire, autistique, c’est un phénomène d’inconscient réel dénoué. En général on a affaire à des sujets qui sont plutôt accessibles au transfert, et pour qui le nœud borroméen est déjà fait, déjà là, donc ce réel est déjà noué, si ce n’est enchaîné. Mais quand le sujet présente des phénomènes pas noués, on essaie de les nouer, cela donne au mieux ce que j’appelle enkystés, dans la mesure où cela ne change pas, où cela reste en place, mais où c’est localisé dans l’homéostase sinthomatique à la fois symbolique et imaginaire du sujet. J’ai été tout à fait intéressée par un cas présenté à Avignon39, extrêmement instructif pour ce débat. Celui d’une petite fille qui a fait un placement de jouissance tout à fait singulier, spécial, puisque il s’agit du plaisir extrême — elle ne dit pas jouissance —qu’elle a pris dans le récit de Blanche Neige, à l’instant où elle avalait la pomme empoisonnée. Il y a trois occurrences où elle évoque un même  plaisir nocif pour elle, voire mortel ! Évidemment dans son premier rapport avec les garçons, elle se livre à cette jouissance-là. Quelque chose qui manifestement était là depuis le début, qui n’a pas bougé. L’analyste a fait un gros travail : la petite fille a établi des rapports imaginaires à peu près normaux, ses questions sur l’Autre, que veut l’Autre de sa mère, toute l’interrogation transférentielle semble là aussi normale, sauf qu’il y a ce truc là qui demeure enkysté, et dont on ne sait pas s’il pourrait passer à l’acte à tout moment. On peut essayer de nouer un réel invraisemblable, mais il peut toujours s’émanciper, surtout quand il s’agit, comme dans ce cas là, de la jouissance d’aller à la mort.

(Texte non relu par l’auteur)

 

1 FREUD S., « Au delà du Principe de Plaisir », Chap. 3, in Essais de psychanalyse, PB Payot, 1981, p. 60.
2 LACAN J., « La direction de la cure et les principes de son pouvoir », in Écrits, 1958, Paris, Seuil 1966, p. 591.
3 Par l’intermédiaire de la demande tout le passé s’entrouvre jusqu’au fin fonds de la première enfance. Demander le sujet n’a jamais fait que ça, il n’a pu vivre que par ça, et nous prenons  la suite. Ibid., p. 617.
4 Ibid., p. 591.
5 LACAN J., Le Séminaire, Livre XI, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, 1964, Paris, Seuil, 1973, p. 67, p.118 et p.229.
6 LACAN J., Le séminaire, livre V 1957-1958, Les formations de l’inconscient, Paris, Seuil, 1998, p. 424.
7 LACAN J., « Préface à l’édition anglaise du séminaire XI », 1976, in Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 571.
8 FREUD S., « Le Fétichisme », 1927, in La Vie sexuelle, PUF, Paris, 1969,  p. 133.
9 LACAN J., « Préface à l’édition anglaise du séminaire XI », 1976, in Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 573.
10 LACAN J., « L’acte psychanalytique », compte rendu du séminaire, 1967-1968, in Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 376.
11 LACAN J., Le séminaire, Livre XXI, Les Noms du Père, 11 décembre 1973, p. 51.
12 SOLER C., «Le présent perpétué de la répétition», Avignon, 20 mars 2010, in Revue nationale de clinique psychanalytique du Champ Lacanien N° 11, 2011, Ed Hermann, p. 197.
13 « C ’est seulement dans cet effet d’entropie, de déperdition, que la jouissance prend statut, qu’elle s’indique … c’est seulement cette dimension de l’entropie qui fait prendre corps à un Plus-de-jouir à récupérer… seul point de perte par où nous ayons accès à ce qu’il en est de la jouissance », LACAN J., Le Séminaire Livre XVII, L’envers de la psychanalyse, Le Seuil,1991, Paris p. 56.
14 SOLER C., Lacan, l’inconscient réinventé, PUF, Paris, 2009, p. 139-140. « Quand elle n’est pas toute phallique, Autre, [la jouissance] elle reste non marquée, habitant cependant le corps substance, car, pour jouir, il faut un corps vivant. »
15 LACAN J., Le Séminaire Livre XI, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, 1964, Paris, Seuil, 1973, p. 54-57.
16 LACAN J., Le Séminaire Livre XXI, Les non-dupes errent, 18 décembre 1973, inédit, ALI, p. 63.
17 « Eli, Eli lama sabaqtani » Mt 27/46 & Mc 15/34.
18 LACAN J., « Introduction à l’édition allemande des Écrits », Silicet V, Seuil, p.16 et Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 558.
19 SOLER C., « Les Uns que chiffre l’inconscient », Lacan, l’inconscient réinventé, PUF, 2009, p. 20.
20 LACAN J., « Compte-rendu de …Ou Pire », Scilicet V, Seuil,  note p. 8 & Autres Ecrits, Seuil, Paris, 2001, p. 550.
21 LACAN J., « Introduction à l’édition allemande des Ecrits », Scilicet V, Paris, Seuil, p. 14, 15 et 16 et Autres écrits, Seuil, 2001, p. 556-557-558.
22 LACAN J., « Le Discours de Rome », in Autres écrits, 1953, Paris, Seuil, 2001, p. 146. cf. Télévision, Seuil, 1974, p. 40.
23 LACAN J., « L’étourdit », in Scilicet IV, p. 42-43, 50 & Autres écrits, 1972, Paris, Seuil, 2001, pp. 486-493.
24 FREUD S., « L’analyse avec fin et l’analyse sans fin », 1937, in Résultats, idées, problèmes, Tome II, Paris, PUF, 1987, p. 268.
25 LACAN J., Scilicet I, p. 26, Seuil 1968 &Autres Ecrits, Seuil, Paris, 2001, p. 255.
26 LACAN J., « Préface à l’édition anglaise du séminaire XI », 1976, in Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 572.
27 LACAN J., Le Séminaire Livre XXIV, 16 novembre 1976 (Édition ALI p. 11).
28 LACAN J., « Préface à l’édition anglaise du séminaire XI », 1976, in Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 573.
29 SOLER C., Lacan, l’inconscient réinventé, PUF, 2009, pp.17-18-69-75-132-184.
30 mystagogie (= initiation aux mystères) Lacan J., Conférence à Milan, in Scilicet I, p.59 et De la psychanalyse dans ses rapports à la réalité, 1967, & Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 359.
31 « [Freud] ne fut pas seulement le sujet supposé savoir. Il savait …», LACAN J., Le Séminaire Livre XI, Les quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse, 1964, Paris,  Seuil, 1973, p. 211.
32 LACAN J., « L’étourdit », in Scilicet IV, p. 48 et sq, Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 491.
33 Ibid., Scilicet IV, p. 49 et Autres écrits, p. 492.
34 Ibid., Scilicet IV, p. 42, et Autres écrits, p. 485.
35 FREUD S., « Analyse d’une phobie chez un petit garçon de 5 ans »in Cinq Psychanalyses, PUF, Paris, 1970, p. 120, OC Quadrige, 2006, PUF, p.36, GW VII Fischer Verlag p. 277 « Longtemps avant qu’il fût au monde, j’avais déjà su que viendrait un petit Hans qui aimerait tant sa mère qu’il devrait forcément pour cela avoir peur de son père et je l’avais raconté à son père »
36 LACAN J., Scilicet V, Seuil, p. 17 et Autres écrits, Seuil, Paris 2001, p. 559.
37 LACAN J., Autres écrits, Seuil, 2001, p. 573.
38 SOLER C., Lacan, l’inconscient réinventé, p. 146.
39 CASTELBOU A., « Répétition de TS et transfert », Avignon, 20 mars 2010, in Revue nationale de clinique psychanalytique du Champ Lacanien, n° 11, 2011, éd. Hermann, p. 135.